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L'humour d'être vieux, ça existe, enfin, autrefois ça existait

Naguère, on consentait aux vieillards le privilège de se moquer de leurs propres travers, de leurs trous de mémoire, de leur logique burlesque. Aujourd’hui, c’est devenu de mauvais goût. On assiste à ce que les Diafoirus appellent une médicalisation du problème. Ça veut dire qu’on ne se moque plus des gens âgés, parce que ce qui leur arrive n’est pas leur faute.

 

Du coup, les vieux, par ailleurs privés de leur auditoire de prédilection et condamnés à la seule compagnie de leurs pareils, ne voient plus ou est l’intérêt de se moquer d’eux-mêmes et de surcroît devant des gens qui leur ressemblent. Ils se moquent plutôt les uns des autres, ce qui est moins drôle. Du véritable humour, ils perdent l’habitude. En revan­che, ils prennent celle de nous accabler de niaiseries sur les misères de leur existence et les jeunes font semblant de les écouter gravement, en songeant qu’ils vont être en retard au cinéma.

Ainsi disparaît peu à peu l’un des charmes les plus délicieux de la vieillesse qui consiste à plaisanter de la vie. Elle préfère s’en plaindre.

Par bonheur, parmi ceux qui ont échappé à l’in­convénient d’une médicalisation du problème (il en reste quelques millions, dont on ne parle jamais à la télévision), nombreux sont ceux qui n’ont pas renonce à l’humour d’être vieux et qui savent très bien de quoi je parle.