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Quand un blanc-bec hésite entre le monde des parvenus et celui des m'as-tu-vu

Il y a deux sortes de personnalités politiques qui aiment particulièrement fréquenter le monde du cinéma et des paillettes: les m'as-tu-vu et les parvenus. Nous nous garderons bien de dire si le Premier ministre, en débarquant à Cannes, fait partie des uns ou des autres, bien qu'à la réflexion on puisse être les deux en même temps.

 Le m'as-tu-vu se contente de vouloir monter les marches pour profiter d'un instant d'exposition médiatique et raffiner son image au milieu d'un monde auquel il pense, sincèrement, appartenir de plein droit. C'est souvent le cas. On songe à certaines Rayban célèbres, à certains yachts de milliardaires. On songe aux copinages hors caméra, aux tutoiements de célébrités, aux prénoms «tout-court» qui reviennent dans la conversation de l'ancien président quand il se lâche en privé à propos d' «Angela» ou de «Barack».

Le parvenu, lui, est différent: il n'en revient pas d'être arrivé au sommet . Il semble avoir oublié que la principale raison était que ses rivaux se sont pris les pieds dans le tapis rouge. Au début, il a beau être photographié parmi les stars, on a l'impression qu'il va demander des autographes. Il paraît toujours sur le point de faire un selfie avec Deneuve. Il n'a pas digéré ce qui lui arrive. Hélas, il se persuade rapidement qu'il a l'étoffe du rôle et il «surjoue grave», comme disent les adolescents. Il ne sait pas rester simple, mais reste naïf. Il parle de vigilance républicaine et se prend pour Clémenceau sans se douter que son modèle l'aurait traité de blanc-bec. C'est Irénée Fabre, le Schpountz de Pagnol. En général il lui arrive malheur avant la fin de l'histoire parce qu'il est monté dans l'ivresse et s'expose à la gueule de bois.

On nous dit que Manuel Valls est venu spécialement pour voir le film de Nanni Moretti. Mais ce qu'on ne nous dit pas, c'est que ce cinéaste est terriblement égocentrique, hyper-narcissique, qu'il multiplie les mouvements de menton et les froncements de sourcils, et qu'il est célèbre à travers toute l'Italie pour les parodies qu'en donne un acteur nommé Ballantini dans l'émission Striscia la Notizia.

J'allais oublier un détail dans le portrait du parvenu: pour se sentir plus à l'aise parmi les grands, il aura tendance à fréquenter ceux qui lui ressemblent.