Campagnol

Quand un candidat à la présidentielle n'a vu aucun des films français qui ont fait 10 millions d'entrées

J'ai eu l'occasion récemment de rencontrer un homme politique de premier plan, candidat à la présidentielle c'est vous dire, une pointure, un calibre. En revanche je ne vous dirai pas s'il a déjà été président, ce serait trop facile. Parmi les questions que je lui ai posées, il y en a une que je lui repose là devant vous, ou plutôt plusieurs qui revenaient à la même. Elle concernait les titres d'une dizaine de films qui avaient dépassé les dix millions de spectateurs en France depuis quinze ans et dont je voulais simplement savoir s'il les avait vus. Donc ,je lui ai dit, avez-vous la vie est un long fleuve tranquille, les choristes, Amélie Poulain, Bienvenue Chez les Chtis, Intouchables, avez-vous vu la famille Bélier, qu'est ce qu'on a fait au Bon Dieu, le dîner de cons, les trois frères ? Eh bien non. Il n'avait rien vu. figurez-vous que ce monsieur qui prétendait gouverner la France et la connaître donc intimement avait vu la grande vadrouille à la rigueur Jurassic Park mais rien d'autre. Eh bien c'est très dommage. C'est même une faute qui en dit long sur le personnel politique depuis quarante ans. A Campagnol, le petit village qui est mon sujet d'études favori et dont j'ai été l'un des conseillers municipaux, on a organisé d'après mon souvenir, deux séances des Choristes pour 600 habitants. Pour un élu normalement ça aurait dû être intéressant de savoir pourquoi mais pour lui, pour mon candidat à la présidentielle, non. La sociologie immédiate que l'on trouve, dans le cinéma français qui marche le mieux l'analyse parfois très sévère et très fine de la psychologie nationale à travers, rappelons-le, des films qui dépassent tout de même les dix millions de spectacteurs, c'est à dire une grosse partie de la nation, tout cela lui passait complètement au dessus de la tête. Ou plutôt, et c'est là que je veux en venir, toutes ces choses lui paraissaient au contraire très très en dessous de son niveau, dont il avait visiblement une idée exagérée. C'est là que le monde politique français ne sait pas ce qu'il perd, ou plutôt si, c'est l'une des raisons pour lesquelles il va perdre ses mandats dans quelques mois et nous n'allons pas le plaindre, il l'aura bien cherché. Autrefois on votait pour ces gens-là malgré le fait qu'ils ne connaissaient pas le peuple. Pourquoi ? Parce qu'on en attendait des avantages, des passe-droits, des permis de construire, des marchés publics et des subventions. Et surtout on attendait d'eux le maintien de notre sécurité par des votes judicieux et courageux au parlement. Désormais il n'y a plus d'argent pour payer tout subventions et avantages. Et en plus ils n'assurent même plus le minimum, c'est à dire la sécurité. 164 députés ont voté au début de l'été le refus d'une mesure de fermeture des salles de réunion de l'ennemi, qui semblait, pourtant, s'imposer afin que la lèpre du totalitarisme ne s'étende pas davantage. Donc on ne peut plus compter sur eux.   Ils vont être obligés de prouver cette fois, cette année, lors des prochaines élections, qu'ils savent comment vivent les gens simples, les gens qui ont du mal, et notamment qu'ils ont vu les mêmes films, ils dont donc intérêt à se procurer les DVD au plus vite. S'ils ne veulent pas le faire et les trois quarts ne le voudront pas, ils seront chassés pour désinvolture et le plus tôt sera le mieux.