Le Figaro & autres

Fascisme tendance Casimir: le Président intimide les journaux et les juges tout en souriant aux enfants.

J'affirme que le président de la République ne garantit plus la liberté d'expression. J'affirme qu'il l'entrave directement.
Lancée il y a deux ans, la version Internet du Figaro a connu un succès dont l'auteur de ces lignes ne peut qu'écrire qu'il y a largement contribué : il y détient, cette année, le record de fréquentation pour un seul article  (et  pour l'année dernière, il est vice-champion, même si, convenons-en, le championnat est assez dérisoire)


Or il ne s'agit pas de n'importe quel article. Il s'agit d'un article très sévère pour le Président. Et pas pour sa politique ( laquelle relève de l'opinion), mais pour son langage, son défaut de jugement, le laisser-aller qui règne chez ses conseillers, sa pignouferie narcissique dans le discours etc. Et là il ne s'agit plus d'une opinion, mais d'un ensemble de faits vérifiables. Ce relevé d'observations, qui n'est pas le premier qu'ait dressé l'auteur à son sujet depuis son élection, a recueilli, il y a un mois 180 000 lecteurs dits uniques, soit le record pour le Figaro Vox.

 Il est bon de savoir que l'auteur alimente les colonnes de ce journal deux à quatre fois par semaine depuis deux ans, recueillant souvent jusqu'à 20 000 "likes" sur Facebook, le tout gratuitement évidemment, ce qui ne l'empêche pas de contribuer à faire la fortune de la régie publicitaire du Figaro (alors que ses livres lui rapportent, annuellement, à peine de quoi vivre). La plupart du temps il est prié par téléphone, ou par SMS, de "réagir à chaud" , c'est à dire de traiter tel ou tel sujet à la volée. Déclarations idiotes, violence gratuite, mépris des pauvres, ministres incultes, vulgarité des médias, tout fait partie du champ de ses commentaires. Le volume et la fréquence de cette collaboration sont d'ailleurs relevés, avec effroi,  début octobre, par le Nouvel Obs qui le traite de "véritable machine de guerre".

 Qu'un journal comme l'Obs se plaigne de la guerre "réactionnaire" menée par le Figaro, c'est normal. Mais que, semblant obéir aux préférences de ceux qui le critiquent, le Figaro cesse, immédiatement, de commander quoi que ce soit à un auteur hyper-sollicité trois semaines plus tôt, plébiscité par ses lecteurs, détenteur du record de fréquentation de l'année, et qu'il refuse de lui expliquer quoi que ce soit au téléphone, signifie que quelque chose s'est passé.

 Quelqu'un s'est fâché.

 Quelqu'un a parlé à quelqu'un.

 La Direction, la Rédaction, la Présidence de la République, le Gouvernement n'ont pas apprécié l'article le plus lu de l'année. Comme l'illustre le cas de ce présentateur de la météo qui vient d'être remercié pour avoir critiqué les lubies des spécialistes du climat, il existe en France des vérités obligatoires. Et d'autres qu'on ne peut nommer sans perdre son salaire. Plus la perspective d'un effondrement du pouvoir se précise, plus il se raidit pour en retarder l'échéance. Le Figaro a obéi au Pouvoir pour contenir l'effondrement.

 Dans mon humble cas on mesure à quel point il s'agit de minimiser une lame de fond dans l'opinion, une vague scélérate que l'on sent monter, qui va déferler, et dont je ne suis, bien entendu, que le bateau-sonde, le chalutier qui chevauche le tsunami  en pleine mer. J'annonce la submersion. Je suis pendu à la radio de bord depuis des mois. Aucun des mes articles sur le désastre Hollande n'a réalisé, depuis deux ans, un score insignifiant, ce qui est facile à vérifier sur Google. Mes arguments psychologiques, psychanalytiques, linguistiques à son sujet sont repris depuis deux ans dans la plupart des blogs d'opposition du pays. Mes articles sur les silhouettes dont il s'est entouré, les Belkacem, les Filippetti, les Fleur Pellerin sont traduits par le New York Times et le Corriere della Sera. Twitter se renvoie mes observations sur la lâcheté de l'Etat et Facebook ricane sur le thème "quand tu plussoie le Figaro, tu sais que l'heure est grave". L'Elysée voulait, visiblement, que cela cesse. C'est fait. La Direction du journal voulait éviter de "faire monter" une figure politique féminine trop bien placée dans les sondages, mission accomplie. Je ne suis pas en colère. Les écrivains ont toujours le dernier mot, il leur suffit d'attendre. Mais le Peuple, généralement impitoyable envers ceux qui ont essayé de le faire taire au milieu des périls, n'attendra plus très longtemps.