Le Figaro & autres

Les pierrots noirs hollandais subissent de plein fouet l'apartheid de la morale antiraciste

Dans la série "comment marcher sur la tête avec grâce", la France croyait détenir le pompon après la proposition Mazetier de débaptiser les écoles maternelles, ou celle du Président de la république de faire supprimer le mot race dans la Constitution.

Mais la justice néerlandaise vient de prendre un avantage décisif . Le souci de réformer l'histoire, la tradition, le passé, et bientôt le contenu des livres dans nos vieux pays européens, la rage de débusquer partout les témoignages de discrimination, vient d'avoir raison du Noir Zwarte Piet, qui suit le père Noël dans les rues d'Amsterdam et qui est à mi-chemin entre Sancho Pança et le croquemitaine. Dans le même esprit, on peut s'attendre à ce que l'expression "tête de Turc" finisse par devenir hors-la-loi chez nous, au même tire que les mannequins de bois à figure noire qui servaient à rompre des lances avant les tournois, et qui en sont l'origine. Il va falloir fouiller les musées à la recherche des gravures qui comportent des effigies de Sarrazins, demander aux Corses d'ôter le symbole dégradant qui orne leur drapeau, envoyer des bataillons de gardiens de la vertu surveiller les représentations de l'Ile aux Esclaves de Marivaux (où les personnages sont traditionnellement peints en noir, tandis que dans la version du Cid présentée en 1998 au festival d'Avignon, l'acteur noir, lui, n'était pas peint en blanc).Pour les générations qui vont se pencher sur la nôtre et qui vont se demander ce qui nous est arrivé, il est temps de prendre date et d'affirmer qu'il restait des gens normaux en 2014. De même que "certains spectacles" font salle comble depuis l'intervention acrobatique du Conseil d'Etat sur l' ordre de Manuel Valls, l'anti-racisme maladif, sourcilleux, ivre de son pouvoir sur les esprits, est sur le point d'obtenir en Europe le résultat contraire à celui qu'il escompte. L'imagination de ceux qui résistent aux gardiens de la vertu étant sans limite on peut s'attendre à quelques épisodes divertissants. On interdit ( en vérité on pénalise, ce qui paraîtra sans doute invraisemblable à nos descendants quand les esprits se seront calmés) un geste de la main sur l'avant-bras, mais ses variantes sont déjà innombrables. L'esprit de résistance se répand chaque jour. Le mot quenelle auquel renvoie ce geste, pour peu qu'il soit imprimé sur votre T-shirt, vous privera bientôt d'entrée dans les stades. Si les fabricants de T-shirts impriment un grand Q sur la poitrine des récalcitrants, on peut craindre que ces derniers ne soient chassés des lieux publics. Le problème n'est plus de savoir quand cela s'arrêtera, car cela s'arrêtera forcément un jour, mais où, et au prix de quels dommages pour l'ordre public.

Les patrouilleurs de la vie sociale et les vigilants de toute espèce devraient se rendre compte, dès maintenant, que la tentation de contrôler le vocabulaire et les pensées d'autrui n'a jamais rien valu de bon à ceux qui ont cru pouvoir s'y livrer